
Interview d’Arsonist pour une rétrospective Ars Moriendi, son projet de black metal progressif et atmosphérique. Il revient sur les diverses influences qui ont forgé l’identité d’Ars Moriendi. Le texte ci-dessous illustre quelques notions historiques ayant contribué à la création d’une discographie étalée sur 20 ans, l’âme d’Ars Moriendi. (Vérités historiques plus ou moins respectées bien sûr)
Musiques :
- Ben Guinchi & Death Throne – Parole de métaleux thème
- Ars Moriendi – Enfermement monastique, Sepulcrum, Crisis, médiocre fin ?, interlude, je vois des morts

Maqué, Florence, pasta, tradizion et tutti quanti.
Florence – Italie – 1484
Asmoth pénétrait dans l’antre de l’archevêché du Dauði Baldrs. Il avait rendez-vous avec le grand inquisiteur, dont il ne se souvenait plus du nom. Ce détail important lui échappait, tant pis ! Ces derniers temps, le jeune homme été trop préoccupé par sa vie professionnelle et son agenda papier de mauvaise qualité ne l’aidait pas. (Gutenberg inventa l’imprimerie à la même période cependant la production des agendas restait primitive).
Le publiciste médiéviste était néanmoins sûr d’une chose, il fallait convaincre le Saint-Patron du bien fondé de son nouveau produit. Plus facile à dire qu’à faire ! Obtenir un rendez-vous avec le grand inquisiteur relevait du miracle. Asmoth releva pourtant ce défi avec brio grâce à ses contacts dans le milieu des affaires. Le temps était venu aux innovations technologiques pour un nouveau monde en préparation, il en était persuadé.
Rapidement, Roger, le garde fou furieux gracieusement prêté par les Médicis, vint à sa rencontre. Il empêchait quiconque de rentrer sans une autorisation explicite.
– Halte là ! Qui va là manant ?
– Manant…Manant…Je dirais plutôt « jeune entrepreneur ».
– Je ne suis pas là pour les jugements de valeurs. Contrôle d’identité ! Qui dois-je annoncer ?
– Asmoth pour le Grand Inquisiteur.
– Oui en effet, vous êtes inscrit dans le registre. Allez, entrez et plus vite que ça ! Je vous escorte…
Asmoth suivit le garde sans broncher. Il devait rester concentré pour espérer vendre son produit. Son argumentaire commercial était rodé, il l’avait répété durant des jours pour sa rencontre avec le grand Inquisiteur duchmol. Ô diable comment s’appelait-il déjà ?
– Bonjour ô grand Inquisit…
– Cessez les mondanités tout de suite ! J’ai 10 minutes maximum à vous accorder, il va falloir être efficace, je vous écoute.
– Bien. Asmoth reprit son souffle. Les rangs de nos concitoyens décimés par la peste noire m’ont conduit à apporter une solution innovante pour le manque d’effectif de l’église. Je vous ai préparé un “petit fascicule des derniers instants”. Chacun peut alors accompagner son mourant, sans officiel de l’église, prêtre de paroisse ou autre, en toute liberté et dans la joie. J’ai appelé cette révolution : l’ars moriendi, autrement dit, l’art de mourir.
L’inquisiteur ne réagit pas. Il regardait d’un œil méchant Asmoth qui essayait de trier des liasses de papier éparpillées devant les piles de dossiers administratifs.
Asmoth suait énormément mais continua son exposé.
– Voici une planche particulièrement réussie. L’orgueil du mourant est l’une des 5 tentations exposées par l’Ars Moriendi. Le diable en personne propose une couronne au mourant sous l’œil désapprobateur de Marie, Jésus et Dieu. Oui, je propose une imagerie de Dieu personnifié, le client se sent ainsi proche de sa divinité, dit Asmoth comme pour se parler à lui-même. L’idée majeure de ce texte muet – On s’adapte à la masse illettrée ! – est de bien préparer les extrêmes onctions sans pour autant se détourner de l’église.

L’orgueil du mourant.
Un silence s’installa.
– Par Mortiis le troll de Natas ! S’écria l’inquisiteur. Ton idée n’est pas si saugrenue que ça. As-tu d’autres péchés explicités ?
– MMh oui, bien sûr, j’ai d’autres concepts de propagande en stock, comme on dit dans le jargon de mon métier. J’ai le manque de foi, le désespoir, l’impatience… Notez la qualité de créativité de « l’impatience ». L’idée vient de Venefica ! C’est une sorcière qui administre drogues, potions et poisons aux impatients qui souhaitent s’enquérir de fortune et de femmes.
– Oui, oui je vois… Attention à ne pas trop en faire avec ces diablesses ! Avez-vous quelque chose de plus….Comment dire, auditif ?
– Et comment donc ! Je suis heureux que vous me posiez cette question ! J’ai mieux que simplement auditif, j’ai en chanson !
Asmoth déballa une guitare mauresque, accompagnée d’un mini amplificateur fabriqué pour l’occasion par Léonard de Vinci (j’avais prévenu sur la quasi exactitude historique !), qu’il portait en bandoulière.
Ars bene Moriendi
Tu t’es vu confier le livre de mort
Le recueil, accompagnant tes derniers instants
Celui qui te permettra de sauver ton âme
Celui qui te permettra de pénétrer les ténèbres sans crainteL’Ars Moriendi, cette fable vicieuse
Habile à dompter les esprits innocents
L’Ars Moriendi, cette quête pernicieuse
Enclave les âmes et les arrache au tempsRegarde fixement ces tristes sires
Transperce leur âme déshonorée
Par le mensonge et la turpitude
Tu n’y trouveras que désolationLe moment est venu de rejeter le livre de mort
Et de rendre son âme au temps
Car s’il est un art de bien mourir
Il n’est que l’oeuvre du pourrissementCar n’espérons rien de la mort
Qu’un repos éternel…
– Je crois que tu t’égares Asmoth. Quelle est cette musique diabolique qui surchauffe mes oreilles ? Tu vas finir à la vierge de fer, ça va te détendre ! Crois-moi ! Roger ! Veuillez attraper cet hérétique, ce suppôt de Satan !

La vierge de fer est un des groupes fétiches d’Arsonist.
Asmoth se débattait comme un lion malgré les coups au visage de Roger. Ce dernier, alourdi par son armure, amplifiait le matraquage de l’homme avec des coups de métal dans la carcasse douloureuse du malheureux.
– Voilà Maître, l’hérétique a été maîtrisé.
– Quel est ton nom Inquisiteur… Emit faiblement Asmoth, la bouche en sang et une dent au sol.
– Je suis Jérôme Savonarole. Le Bûcher des Vanités et la solution à tous péchés. Quelques épreuves de foi nettoieront ton âme souillée.