Interview de Ben et Flo du groupe de black metal français Maïeutiste. La musique de Maïeutiste est un mélange audacieux et réussi entre doom et black progressif. Cette interview donne l’occasion à une rétrospective de leur œuvre et à un partage de leurs convictions profondes autour de l’art. Ils nous parleront également de leur 3 ème album en gestation.
Musiques :
- Ben Guinchi & Death Throne – Parole de métaleux thème
- Maïeutiste – Death to Socrates, Suspiramus, Universum, The Eye of the Maieutic Art
Asmoth se réveilla dans un endroit inconnu, par terre, le dos en vrac. Un objet familier se trouvait près de lui : un CD de l’album Veritas. Asmoth se rappelait bien toutes les chansons. Une vieille carte dans le booklet provenait d’un vieux labyrinthe : Myst ! « C’est totalement absurde, sans aucun sens. » Un vent lui caressa la joue, ses habits était bien à lui, et pourtant quelque chose n’allait pas. Il ne se reconnaissait pas totalement. Tout était haché et dissonant dans son esprit.
Perdu.
Un homme se déplaçait dans sa direction. Habillé d’une toge antique, il s’approchait en traînant ses sandales dans la poussière. Il ne venait pas d’un monde pétri par la technologie. Il était d’un autre temps.
« Bien le bonjour, Asmoth. Je suis ton précepteur, un des disciples du très connu Socrate, le philosophe Grec bien sûr… Je m’appelle Roger.
– J’accepte. Comment en serait-il autrement ? Où suis-je ?
– Tu m’as l’air soucieux. Tu sembles plus occupé par l’art de paraître vrai plutôt que de demeurer authentique.
– Je demande simplement le nom de ce lieu. Peut-être pouvez-vous me renseigner… Qui suis-je ? Asmoth ne souffrait d’aucune peur, il ressentait un profond sentiment d’acceptation et de curiosité. Après un moment de silence, il reprit.
Qu’est ce qui vous fait dire cela, Roger ? Je suis vrai.. Je suis là !
– Parce que l’homme errant est calme, mais l’homme perdu n’est pas.
– Je suis perdu certes, mais je ne suis pas stupide, il est évident que je suis dans la panade. Répondez à ma question. Où suis je ?
– Et si la réponse était une question absurde. Paracletus ? »
« L’album ou le protecteur ? Reprit Asmoth, désireux de trouver un échappatoire à cette situation.
– Je n’ai pas les réponses.
– Hum je vois Roger, tu veux me plonger dans un délire maïeutique et me faire accoucher d’une vérité.
– Pas n’importe laquelle aussi, celle qui aboutira à ton salut.
– Reprenons, annonça Asmoth. Il parla alors à haute voix pour façonner sa réflexion. Les mots lui échappèrent. Je me réveille dans cet endroit limite surréaliste. Un mec en toge se pointe. Il m’interroge bizarrement. Il me balance au visage Paracletus. Paracletus, le saint esprit, le protecteur. Et moi, tout ce qui me reste ici, ce sont des mots, se lamenta-t-il. Qui est mon protecteur ? dit sèchement Asmoth.
– Toi même, regarde la veritas surtout.
– La vérité tu veux dire ?
– Non Veritas, c’est du latin. Quel est ton art Asmoth ?
– De mieux en mieux. Tu m’embrouilles.
– Souviens-toi, c’est en toi, la vérité émergera de ta personne. Je n’ai rien à t’apprendre.
– Je dois mettre en relation Paracletus et Veritas alors.
– Tu chauffes Asmoth. »
Durant plusieurs heures les 2 hommes restèrent silencieux.
« Tu es là pour me questionner Roger, c’est toi le protecteur. Tes questions sont là pour m’aiguiller.
– Exact, mais encore…
– La vérité est dans cet album, Veritas. Cela semble pompeux et compromis aussi, pourtant la relation est bien établie.
– Oui, es-tu le reflet ?
– Comment ça ?
– Nous sommes tous le reflet de nos actes et paroles, nous existons car les autres nous voient. Si personne ne te voit, crois-tu exister ? Es-tu le reflet ? »
Asmoth s’éloigna alors. Il fallait absolument qu’il trouve son reflet, il fallait vérifier son existence tangible. Quoi de mieux qu’un cours d’eau pour se conforter avec son image ? Le bruit d’une rivière l’attira.
Dans l’eau, un reflet flou, brouillon, comme une personne effacée par une vie en inadéquation avec son milieu. De rage, il jeta des cailloux et son image devint encore plus trouble. Il hurla jusqu’à la nausée. Aucune vie aux alentours ne réagit. Aucun bruit d’oiseau, aucun bruit de feuille. Où était le reflet de la vie ?
Je suis pourtant vivant ! Je suis pourtant vivant ! Je suis pourtant vivant ! Je suis pourtant vivant ! Je suis pourtant vivant !
Vivant ?
Déclic.
Il revint calmement vers Roger.
« Je ne suis pas ‘moi’ actuellement. Je suis comme enfermé dans un lieu que j’ai pourtant voulu. La vérité est dans veritas. N’es-tu pas en fin de compte l’émissaire de ma propre conscience venu me sauver ? Cette carte ne sert à rien, excepté à m’ancrer davantage dans cette réalité alternative ! Elle souhaite me lancer sur une fausse piste, je ne sais pour quel dessein.
– Quand on comprend, on brise ses chaînes, affirma Roger. »
Roger se brouilla comme plus tôt l’image déformée d’Asmoth. Le monde se disloqua, s’effondra sur lui-même. Le monde fait de poussière s’évapora. Roger et Asmoth disparurent.
Vide. Sueur.
Asmoth ouvrit les yeux, toucha son visage. Il se sentait à nouveau chair et non plus ombre. Dans son appartement, le CD de veritas trônait en haut de la chaine hifi. Il s’était abandonné puis submergé par la musique…Que s’était-il passé ?
La peur l’envahit, des grosses gouttes de sueur perlaient sur son front. Est-ce lui qui s’était plongé dans l’album ou est-ce l’album qui s’était emparé de lui ? Était-il le maître ou le pion ?
La carte siégeait devant lui avec la mention « faussaire ».